Après une expérience réussie avec "Aux petits repas hygiéniques", Maria Legrain décide de fonder un nouveau restaurant antialcoolique. Appelé La Source - comme la revue de l'Union Française des Femmes pour la Tempérance et le sanatorium pour les alcooliques mondains - le nouvel établissement s'installe 99 avenue Ledru-Rollin (Paris 11e), dans un bâtiment haussmannien fraichement construit.
Le restaurant occupe trois niveaux, du rez-de-chaussée au premier étage en passant par l'entresol, et peut accueillir 140 personnes à la fois. Les deux salles du premier étage se transforment occasionnellement en salles de réunion (de la Société végétarienne, par exemple), de lecture ou d'audition. Des jeux divers sont à la disposition de la clientèle, ainsi qu'une bibliothèque "de choix où ne sont introduites que des œuvres de réelle valeur littéraire et les livres de sérieuse vulgarisation scientifique, des revues, des brochures et des journaux".
La journaliste de La Femme, éclairant l'inauguration, apprécie dans La Source "la propreté, le goût, le confort [... un] avant-goût discret du luxe" :
Là, un peu de luxe devient une bonne action. Des cours d'eau que bordent de frais ombrages décorent les panneaux d'une facture agréable ; des arceaux que dessine un treillage vert clair courent le long de la salle et évoqueront les bienfaisants souvenirs des excursions de l'été chez les travailleurs qui prendront leurs repas au restaurant sans alcool [...] (La Femme, mars 1904).
Ce journaliste de L'Illustration remarque aussi la décoration "simple mais non dénuée d'un certain cachet artistique qu'égayent encore des fleurs et des plantes vertes" (26/03/1904). L'Estienne de Gil Blas est plus éloquente et métaphorique dans sa description :
De belles tables de marbre rose s'alignent sur un sol de mosaïque. Des lustres à fleurs électriques jaillissent des plafonds enguirlandés et enrichis de légères nuées envolées sur de l'azur. Les vastes glaces de la devanture s'agrémentent de gracieux brise-bise. Le plein soleil entre partout [...] Ici, un magnifique dressoir pour les condiments et les fruits, là le casier à serviettes. Pas de comptoir, le gérant préside aux repas du haut d'une sorte de bureau-chaire [...] (30/08/1904).
Comentários