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Victoria Afanasyeva

Suppression de l'alcool

Cinquième image de propagande, produite par l'Union des Françaises contre l'alcool.

Carte postale "Suppression de l'alcool" de l'Union des Françaises contre l'alcool, 1920, non circulée.

En 1920, une nouvelle affiche de propagande est présentée par l'Union des Françaises contre l'alcool (UFCA). Elle abandonne la plupart de codes utilisés dans les images précédentes - la guerre, la patrie, la famille - et questionne de front l'accord du droit de vote aux femmes Françaises.

L'image de l'UFCA représente une foule de femmes se pressant devant une urne électorale, sur laquelle on lit : "Suppression de l'alcool". Au premier plan, une femme y glisse un bulletin de vote. Derrière elle, on distingue trois autres électrices : l'une attend son tour, un bébé dans les bras, la deuxième est dans l'impatience de glisser son bulletin dans l'urne, la troisième, militante, brandit le sien. La partie inférieure de l'image scande : "Nous réclamons la suppression de l'ALCOOL de bouche".

Version colorée de la carte postale, circulée en janvier 1930. Delcampe, boutique du vendeur Louloubroc

L'UFCA se tourne vers la thématique suffragiste en mai 1919, lors de sa deuxième manifestation publique. Joseph Reinach, ancien député et l'un des orateurs, réclame alors haut et fort "la reconnaissance publique et légale [des] droits naturels" de la femme française, à savoir son accession au suffrage (Le Temps, 12 mai 1919). Il faut noter qu'à ce moment, tout le mouvement féministe français "se réveille" après un repli de près de cinq ans et reprend ses revendications. Du fait que l'UFCA compte les dirigeantes de principales associations militantes parmi ses membres, elle rejoint bien naturellement le retour du combat suffragiste et s'associe au retour de la devise "Pour combattre l'alcoolisme, la femme doit voter".


Suppression de l'alcool sort des crayons de David Burnand alias Chavannaz, dessinateur collaborant avec l'UFCA depuis 1917. L'image est publiée sous forme d'affiche (réf. 00508734_000004 Sipa Press) et de carte postale. Sur le site Delcampe, on recense pas moins de sept cartes postales non circulées et autant d'exemplaires ayant été en circulation. Par ailleurs, la carte signée en janvier 1930 témoigne du rafraichissement du dessin et de l'application des couleurs.


Reprise de l'image par l'Union Française pour le Suffrage des Femmes, versions monochrome (affiche, La Contemporaine) et en couleurs (carte postale, Delcampe)

Il est remarquable que la même image soit utilisée dans les buts de propagande par une autre association. L'Union Française pour le Suffrage des Femmes (UFSF) l'emploie dans sa campagne en faveur du vote des femmes, aussi bien au format d'affiche que de carte postale.


La seule différence entre les deux utilisations - antialcoolique-féministe de l'UFCA et suffragiste de l'UFSF - consiste aux inscriptions sur l'urne électorale : l'UFSF fait les femmes voter "contre l'alcool, le taudis, la guerre". Laquelle des images a été publiée en premier ? Je serais encline d'affirmer que l'UFCA était la pionnière en la matière :

- sa collaboration avec David Burnand est ancienne et permanente,

- comme les images précédentes, Suppression de l'alcool est produite en cohérence avec l'action que l'Union menait à l'époque,

- le chiffre "20" est distincte et visible contre le pseudonyme du dessinateur. Les affiches de l'UFSF ne contiennent pas de date, tandis que le chiffre présent sur certaines cartes postales est illisible,

- Marguerite de Witt-Schlumberger (1853-1924), présidente de l'UFSF, est membre du comité de l'UFCA dès la première heure ; Cécile Brunschvicg (1877-1946), qui lui succède à la présidence, est aussi l'une des militantes antialcooliques les plus actives.


L'hypothèse reste pour autant à étudier.



Voir l'analyse de l'image de l'UFSF par Danielle Tartakowsky :

Danielle TARTAKOWSKY, « Les suffragettes »,Histoire par l'image [en ligne], consulté le 20 septembre 2020. URL : http://histoire-image.org/fr/etudes/suffragettes?i=282


Je souhaite remercier ici Douglas Jenkinson, Frédérique Burnand et le professeur Philippe Kaenel de leur aide dans l'attribution des dessins de Chavannaz/Chavannes à David Burnand.

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